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Le CRIC fait débarquer le Capitaine Diversité dans les écoles et les animations jeunesse pour sensibiliser les plus petits au vivre ensemble et à l’interculturalité

Cet article a été rédigé par Dominique Watrin du DisCRI (merci).

Capitaine Diversité, ce nom qui sent le superhéros ne vous dit probablement rien. Quoi de plus normal, ce pourfendeur de l’intolérance et de la discrimination vient à peine de débarquer dans le paysage carolo, à l’initiative du CRIC (Centre Régional d’Intégration de Charleroi), pour le plus grand bonheur des enfants et des personnels qui les encadrent. But de sa mission auprès de ces tout petits : questionner leurs représentations pour les sensibiliser aux différences et les guider vers la tolérance.

Le projet « Capitaine Diversité et les mini-citoyens » se présente comme un outil de réflexion sur le vivre ensemble à l’école. Il a vu le jour au départ d’un appel à projets PCI (Promotion de la Citoyenneté et de l’Interculturalité) de la Fédération Wallonie-Bruxelles lancé en 2020. Son initiative fait suite au constat, établi par l’équipe du centre régional, selon lequel il est nécessaire d’envisager la sensibilisation à la diversité et à l’interculturalité dès le plus jeune âge pour faire face aux discours simplistes et aux conduites discriminantes qui s’installent très tôt. L’idée centrale est donc de dialoguer dès le plus âge sur les représentations en vigueur à l’égard de « l’autre » et sur les peurs liées à la différence, et surtout à la méconnaissance, qui se transmettent de manière consciente et inconsciente.

Un double objectif

L’outil « Capitaine Diversité » s’adresse plus spécifiquement aux enfants âgés de 5 à 8 ans. Le choix de cette tranche d’âge, démarrant au début de l’obligation scolaire fixée à 5 ans, correspond à un moment idéal pour insuffler des notions de coopération et de cohésion à entretenir pendant tout le parcours scolaire. Dans ce contexte, le jeu poursuit deux objectifs. Le premier de ceux-ci est de sensibiliser les enfants à la diversité et à l’interculturalité pour démonter les préjugés et les stéréotypes, et ainsi lutter contre le racisme et toutes les formes de discrimination. Il s’appuie sur des techniques participatives et ludiques qui tiennent compte du niveau de développement des enfants et vise à faire évoluer les représentations pour appréhender la différence de manière positive et apaiser les peurs fondées sur des mythes en informant de manière objective, avec la volonté d’aider au développement de conduites plus interculturelles à même de consolider une société plus inclusive.

Le second objectif est d’outiller les professionnels encadrant ces enfants d’un support concret permettant de favoriser les échanges et les interactions entre eux, quel que soit leur profil. Il s’agit d’appréhender la diversité dans sa globalité afin de faire prendre conscience des convergences entre les individus sans nier les divergences et, parallèlement, de déconstruire les préjugés et amalgames pour renforcer la cohésion sociale et le vivre ensemble.

Cinq thématiques

L’outil pédagogique bâti par le CRIC, avec l’appui de l’expertise de l’AVIQ (l’Agence wallonne pour un Vie de Qualité), du CLPS (Centre Local de Promotion de la Santé) de Charleroi-Thuin et de l’asbl Cultures et Santé, met le focus sur cinq thématiques mises en évidence dans le Baromètre de la Diversité Enseignement publié en 2018 par Unia (le service public fédéral indépendant de lutte contre la discrimination et de promotion de l’égalité des chances). Ces thématiques sont l’origine ethnique, l’origine sociale, l’orientation sexuelle, le genre et le handicap, et sont abordées à travers des personnages-clés mis en scène dans de petits récits.

Le jeu est centré sur la vie à l’école, que ce soit en classe ou dans la cour de récréation, un cadre qui fait référence au quotidien commun à tous les enfants. Il guide les professionnels dans le lancement d’un questionnement sur la diversité et invite les enfants à exprimer leurs vécus et leurs émotions, en partant d’un ensemble d’illustrations mettant en scène une variété de situations qu’ils vont identifier en s’appuyant sur leurs propres représentations. Le but poursuivi est à la fois de développer leur esprit critique, une compétence fondamentale pour leur vie future, et de développer l’empathie à travers l’apprentissage interculturel qui est un processus qui s’entretient toute la vie.

La diversité comme seule norme existante

L’approche ludique privilégiée consiste à apprendre en s’amusant, en manipulant et à participer en étant créatif, en s’exprimant sans jugement. Le postulat qui est défendu tout au long de la démarche est que la seule norme existante est la diversité. L’idée est d’amener les enfants à effectuer les trois étapes du processus interculturel, à savoir la décentration (prendre conscience de ses représentations, puis s’en distancier), la compréhension du système de l’autre (son cadre de référence incluant ses racines, ses valeurs, ses croyances, etc.) et, enfin, le dialogue (rencontre de l’autre et de soi dans nos différences) et la négociation (la recherche de valeurs partagées pour bâtir un mieux vivre ensemble dans un respect réciproque).

L’outil « Capitaine Diversité » recèle évidemment certaines limites. Il se base sur différentes séquences pédagogiques envisagées sur un mode ludique et progressif, mais il est loin d’être exhaustif. Il se veut complémentaire dans une approche préventive et réflexive à renouveler en permanence par les équipes éducatives. Au niveau illustratif, la préoccupation a été de veiller à ne pas entretenir les stéréotypes mais la représentativité de la diversité reste toujours perfectible.

Une galerie de personnages

Comment se déroule le jeu ? Le cheminement avec l’outil comprend 14 étapes. Composé de deux planches représentant l’une la cour de récréation, l’autre l’intérieur d’une classe, son univers est peuplé d’une galerie de personnages reflétant chacun un volet de la diversité. Capitaine Diversité, la mascotte du jeu, s’invite dans ce monde qu’il observe pour dialoguer avec les enfants. Il raconte, pour chaque thématique, le récit d’un personnage-clé sur lequel il pose un regard bienveillant, suscite la discussion et interroge les enfants sur leur ressenti, avant de les inviter à trouver ensemble une solution à la problématique abordée.

Concrètement, Capitaine Diversité s’adresse aux enfants. Dans un premier temps, il les salue et leur raconte, fiches à l’appui, l’histoire des différents personnages-clés. L’idée est de transmettre au groupe d’enfants l’image d’un arc-en-ciel, avec un monde constitué de couleurs différentes. Ensuite, Capitaine Diversité leur demande ce que signifie pour eux le mot « diversité », après s’être assuré de la bonne compréhension du mot.

L’étape cruciale de l’observation

Dans un deuxième temps, la mascotte fixe le cadre de l’animation axé sur la bienveillance, avec une importance pour le respect des autres, l’écoute, la demande avant la prise de parole, etc. La troisième étape vise à mettre en évidence les ressemblances de manière ludique. Pour ce faire, un jeu des points communs est organisé. Au cours de celui-ci, les enfants se mettent en cercle et, à tour de rôle, chacun fait un pas en avant, énonce une caractéristique et tous ceux qui partagent celle-ci avancent également d’un pas.

La quatrième étape est celle de l’observation du quotidien à l’école à travers les planches. Au cours de celle-ci, les enfants sont invités à former deux groupes pour aller observer chacune des planches, relatant la vie de l’école, qui présentent des scénettes recélant des « incidents critiques » auxquels peuvent être confrontés enfants et enseignants. Cette phase est la plus importante de l’animation. Elle requiert attention et vigilance de la part de l’enseignant ou de l’animateur parce qu’il importe de relever les différents points de vue, les positifs comme les plus sensibles qui peuvent se révéler déplacés ou inadéquats.

Six récits de vie

La cinquième étape est celle du choix de la thématique, dont certaines sont plus sensibles que d’autres en fonction du contexte de la classe, du vécu de chacun, etc. Autant d’éléments qui doivent être pris en considération dans le choix opéré. La sixième étape est celle du récit qui met en contexte le personnage-clé lié à la thématique choisie. Il y a là six récits mettant en scène Sharif qui vient d’un autre pays (origine ethnique), Clarisse qui habite dans un foyer social (origine sociale), Bruno qui est une fée et Fadila qui est joueuse de foot (genre), Pauline qui a deux mamans (homoparentalité), Miguel qui est en fauteuil roulant (handicap) et Émilie qui a besoin d’aide en classe (inclusion et besoins spécifiques).

Au cours de la septième étape, les enfants expriment leurs ressentis (calme, content, fâché, timide, etc.), après avoir écouté la petite histoire concernée. La huitième étape est celle du message du récit, au cours de laquelle un coup de projecteur est mis sur quelques arguments (à vulgariser selon l’âge des enfants) favorisant le dialogue. Survient alors la neuvième étape, la phase-clé de l’animation sur la thématique. Pour l’accueil du migrant, par exemple, Capitaine Diversité va s’adresser aux enfants dans sa langue imaginaire, incompréhensible pour les enfants, qui va leur permettre de mieux ressentir ce qu’un enfant non francophone vit au quotidien.

Co-construire des règles positives, solidaires et citoyennes

La dixième étape est celle de l’expression des ressentis par rapport au personnage-clé et aux protagonistes du récit. La onzième étape consiste à questionner les enfants sur ce qui peut être fait pour aider le personnage-clé à se sentir mieux afin d’amener le groupe à réfléchir collectivement à des solutions pour anticiper les difficultés et faire en sorte que tous les enfants soient respectés. La douzième étape est celle de la construction avec les enfants du panneau des règles positives, solidaires et citoyennes pour rappeler les principes de bienveillance.

La treizième étape est celle de la conclusion du récit par une fin heureuse, en s’appuyant sur ce que le dialogue et le respect peuvent apporter à l’ensemble du groupe. Enfin, la quatorzième étape est celle de la conclusion de Capitaine Diversité qui met en exergue la diversité, richesse première de la planète Terre, et les valeurs de respect, de bienveillance et d’entraide entre les humains, facteurs de réussite du bien vivre ensemble. La durée de l’ensemble de ces étapes est de cinquante minutes par thématique.

Aborder les prémices du harcèlement scolaire

L’outil Capitaine Diversité s’inspire des thématiques mises en avant par les acteurs de terrain eux-mêmes et permet d’aborder les prémices du harcèlement scolaire. Après avoir parcouru différentes phases tests synonymes de corrections et d’ajustements, il entame aujourd’hui sa carrière dans la vie réelle. Édité, dans un premier temps, à 200 exemplaires, il est disponible gratuitement auprès du CRIC, mais aussi via les autres centres régionaux qui disposent pour l’instant chacun d’un exemplaire.

En ce qui concerne l’animation, celle-ci peut être assurée par l’enseignant.e ou le personnel encadrant, selon qu’elle s’inscrit dans un cadre scolaire ou au sein d’une instance d’animation d’enfants. Le jeu est accompagné d’un guide d’utilisation, ainsi que d’une fiche d’animation spécifique par thématique. Des membres du CRIC sont néanmoins disponibles pour une présentation de l’outil dans chaque structure qui en fera la demande.

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