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SAUDADE #52 : 16 novembre : la tolérance ou l’art exigeant de coexister

Journée internationale tolérance saudade humeur du directeur CRI Charleroi

Chaque 16 novembre, la Journée internationale pour la tolérance nous invite à réfléchir à ce mot que nous croyons connaître.

Est-ce que ce terme, à force d’être invoqué, s’est usé ?  Au moment où les débats sur l’immigration s’installent durablement dans la sphère politique, la figure de l’étranger devient un objet statistique. On compte.  On catégorise.  On classe.

On ne regarde plus des visages, mais des chiffres. Et, paradoxalement, c’est au nom de la « tolérance » qu’on prétendait accueillir, sans jamais vraiment écouter.

Or, la tolérance, lorsqu’elle devient un simple calcul social, peut prendre la forme d’une violence.  Cette violence, c’est supporter sans reconnaître.  On accepte sans comprendre.  On cohabite sans partager.

Tolérer n’est pas suffisant.  Tolérer, dans son sens premier, c’est supporter ce qu’on désapprouve. C’est déjà une forme de retenue. Mais si la tolérance se limite à « supporter » l’autre, elle installe une distance, parfois condescendante, qui maintient les inégalités et nourrit le malentendu.
C’est pourquoi Karl Popper avertissait : une tolérance sans limites, notamment envers ceux qui prônent l’intolérance, conduit à l’autodestruction de la tolérance. Autrement dit, la tolérance ne peut pas être naïve. Elle doit être vigilante, exigeante, active.

Être tolérant ne signifie pas tout accepter. C’est refuser ce qui menace la dignité, la sécurité, l’égalité, le vivre-ensemble.  La tolérance s’arrête là où commencent les atteintes aux droits fondamentaux. Elle ne peut pas être le refuge de l’indifférence, ni le leitmotiv de l’inaction. Car une société qui se contente de « tolérer » sans soutenir, écouter, réparer ou agir, finit par s’éroder de l’intérieur.

Tolérer, c’est aussi préserver la possibilité du dialogue entre des convictions opposées. Cela suppose de défendre les conditions de ce dialogue. Sans ces bases, la tolérance devient une façade.

Au CRI Charleroi, cette journée n’est pas un simple rappel symbolique. Elle interroge notre manière d’habiter ensemble la diversité.  La tolérance se fait « reconnaissance ».  Reconnaître l’autre non comme une différence à supporter, mais comme une présence à écouter, une histoire à comprendre, une part de nous-mêmes à accueillir. La tolérance, dans cette perspective, devient une éthique de la rencontre.  Une éthique qui réclame du courage, de la lucidité et de la tendresse.  Le 16 novembre, souvenons-nous que la tolérance est un travail, patient et collectif, qui engage chacun de nous.  Un travail pour que, derrière les chiffres, nous continuions à voir des vies.

Fabrice CIACCIA, Directeur du CRI Charleroi

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