
J’ai l’impression d’être dans Un jour sans fin avec Bill Murray, coincé dans une boucle temporelle qui amène à revivre sans cesse la même journée. Ce matin, je relisais une carte blanche publiée il y a déjà trois ans. Mêmes problématiques, même interrogations et… toujours au même point. Comme si ces trois années passées n’avaient été que des répétitions quasi inutiles d’une situation moribonde et inerte. Un exemple ?
La crise de l’accueil : acte X. Que dire ? Que faire ? J’ai demandé à différents membres de mon équipe de réagir à chaud et j’y ai rajouté un peu du mien. Ok, on est purement dans le ressenti. Vous voulez de la réflexion ? De la théorie ? De l’action ? Un positionnement ? Passez votre chemin, d’autres rédigent mieux que nous sur ce sujet précis et le cœur, là maintenant, n’y est pas. Ici, à Gilly, en tant qu’humains, on s’étonne et on grogne… Petit melting pot de nos sentiments…
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Que sont ces campements au pied du petit château ? Seraient-ce quelques patrouilles de scouts égarées en ville, quelques néo-nomades en quête de trip urbain ? Nenni ! Surréalisme à la Belge. Honte nationale ! Un surplus de migrants parait-il…
Bidonville en ville, tentes et baraquements, habitat baraki à BXL, capitale de notre beau Plat Pays. Les campements de migrants à l’ombre de Fedasil se portent bien, merci. On vient de loin pour s’y établir et on continue à construire… Humour noir direz-vous ? Que faire d’autre devant une telle aberration ?
Nous, Belgique, applaudie à l’étranger pour sa technologie, sa créativité, ses Bouli liègeois. Elle est belle la charité made in Belgium ! Soyons fiers de notre gestion des migrants. Fermons ce centre, que les migrants à nos portes s’accumulent. Nous pourrons ainsi crier haut et fort à nos électeurs que le fort est pris d’assaut. Il en vient par milliers. Regardez, nous sommes envahis !
Temporisons en vue des élections. C’est le bon moment, faisons un geste rapide, ouvrons un centre national de crise, nous gentils humanistes, vite, vite pour les urnes ! Nous refermerons dans quelques semaines, juste le temps d’un buzz.
Ah ! Belgique. Toi qui peut-être si belle, chantée par les plus grands dont Brel. Écoute les lamentations de ceux qui pleurent aux portes de ton château sous leurs ombrelles ! Pfff…
J’ai mal à ma Belgique (paroles du CRIC) :
Ces personnes m’étonnent par leur capacité de résilience. Ils ne manifestent pour ainsi dire pas. Du coup, on ne les écoute pas (pourquoi perdre son temps ?) et l’on ne s’en occupe pas. Pourtant, ils ont des droits. La Belgique est dans l’obligation d’y répondre.
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Cette errance de 1500 personnes me bouleverse … comment leur permettre de croire en un avenir en Belgique après ça ? Comment espérer qu’ils puissent rebondir après un tel accueil ?
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Est-ce que l’on veut parquer les gens dans une logique sécuritaire (rassurer la population) ou est-ce que l’on est vraiment dans une politique d’accueil pour permettre aux migrants de s’épanouir ?
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Belgique, tu opposes sécurité et solidarité qui déshumanise les gens et leur colle une identité réductrice de « migrant » et qui renforce son contrôle et abandonne ses valeurs fondamentales.
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En tant qu’intervenants en matière d’intégration, nous sommes en contact permanent avec ces « migrants ». On dit que la première impression est la bonne. Quelles blessures garderont-ils de cet accueil made in Belgium ?
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Et donc quid de la suite ? Laisser faire : impossible. Baisser les bras ? Trop confortable et pas l’habitude de la maison… Ne devrions-nous pas plutôt jouer les Dick Fosbury ? Son nom ne vous dit sans doute pas grand-chose mais c’est l’inventeur de la fameuse technique du Fosbury-Flop qui a révolutionné les pratiques et les performances du saut en hauteur. Ho, ce n’est pas un sport qui me passionne particulièrement mais l’homme est mort ce 12 mars, il a donc fait le tour des journaux. Ce qui m’intéresse surtout chez ce monsieur, c’est que dans sa discipline, il a complètement repensé les pratiques (en se retournant pour modifier son centre de gravité ce qui lui a permis de sauter plus haut), bouleversant la donne. De la même manière, ne devrions-nous pas, nous aussi, repenser nos méthodes, nos attentes, nos actions. Pour que les chose changent enfin et que l’on arrête QU’ON ARRÊTE de revivre sans cesse les mêmes mauvaises histoires !
– Fabrice Ciaccia, directeur du CRIC.
Merci à l'équipe pour leurs réflexions !
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