Portraits

Le nouvel Eden

Interview de Fabrice Laurent, directeur de l’Eden

Fabrice Laurent, directeur de l'Eden
Fabrice Laurent, directeur de l’Eden

Avec votre récente prise de fonction comme directeur de l’Eden, quelles sont les nouvelles orientations envisagées ? 

Le fait de vouloir positionner la brasserie comme un lieu de vie, comme un lieu qui soit le point de rencontre des forces associatives carolos, qui soit à la fois un restaurant le midi, un café, un lieu d’accueil des associations, ce nouveau positionnement est déjà une orientation forte. Jusqu’ici la brasserie était surtout un service aux spectateurs, ici nous avons vraiment la volonté d’en faire un lieu d’accueil des publics. Nous accueillons aujourd’hui une série de nouvelles propositions qui ont pour objectif de faire vivre le lieu : cafés numériques, vide dressing, veillées contées, etc. Et tout ça s’intègre dans une démarche d’ouverture d’avantage sur le quartier, sur le centre ville, sur Charleroi, l’arrondissement etc. C’est pour ça aussi qu’on parle désormais d’ « accueil des publics » plutôt que de « billetterie ». L’accueil est désormais pensé comme un point d’information où l’on peut acheter des tickets et pas seulement comme une billeterie.

La Brasserie de l'Eden
La Brasserie de l’Eden

Globalement, la structure PBA-Eden s’est positionnée comme une grande scène de diffusion.Or l’Eden n’est pas qu’une scène de spectacle. Nous sommes avant tout un centre culturel. Dans la répartition des tâches avec le PBA, nous allons nous repositionner sur les musiques actuelles, le jeune public, les pratiques artistiques et la créativité.
L’Eden est une salle de concert historique. En plus de la programmation habituelle de concerts, cela nous permet de travailler avec des collectifs, des groupes carolos,…
Autour du jeune public, nous voulons renforcer les collaborations avec les écoles de l’enseignement primaire, les écoles de devoirs et les plaines de jeux. Il y a un gros enjeu pour que tous les enfants de Charleroi aillent au moins une fois au théâtre, peut-être pas tout de suite mais au moins une fois dans leur scolarité, ce n’est pas un enjeu qui me paraît complètement utopiste. Donc à partir de la saison prochaine, on va renforcer cet axe là en essayant d’allonger le nombre de représentations et d’attirer un plus large public.
L’autre axe concerne davantage la pratique artistique, il n’y a pas que la « consommation de culture » : il y a aussi le fait de pratiquer la culture. Donc un autre positionnement va être de réorienter de manière plus équilibrée la partie expression, créativité, pratique amateur. On reste encore un peu « prisonniers » de l’Eden, qui est surtout une salle de spectacles et des bureaux. On voudrait investir les bâtiments à côté, le numéro 5 au Boulevard Bertrand qui est une ancienne école, ce serait le parfait lieu de pratiques artistiques. Avec la province, on veut en faire un lieu de pratiques, d’ateliers, de stages. Un des axes développés serait les relations entre art et handicap. Ça, c’est un gros enjeu pour les années à venir !
Et puis dernier axe : le rôle du centre culturel dans l’accompagnement des projets, on doit travailler à la régénérescence du monde culturel. Par exemple, on développe une programmation Hip-Hop depuis cette saison. La musique étant un axe fort, l’ouverture au Hip-Hop, c’était aussi un autre positionnement. Nous travaillons avec l’asbl « Back in the days », c’est un jeune collectif de Charleroi.
Travailler à la régénérescence de la vie culturelle, c’est hyper important : on a accueilli une jeune asbl qui s’appelle « la Maison du conte », « maison » mais qui n’a pas de lieu fixe, qui n’a pas de bâtiment et en 2013, on va aussi multiplier les soirées avec eux. Veillée contée, une ballade contée des coulisses de l’Eden – on est dans un lieu de patrimoine. Travailler avec « la maison du conte » c’est aussi accompagner des jeunes porteurs de projet et les accompagner vers la voie de la professionnalisation. Ça aussi c’est un autre axe de travail du centre culturel.
Tout ça avec une dimension transversale car on va essayer d’aller au-delà de nos locaux, on parle souvent de l’Eden – cela reste notre « marque », mais ce n’est pas qu’un bâtiment ! On va aussi se déplacer dans les communes, dans les quartiers.
Que représente pour vous la programmation dans le cadre du Parcours Pluriel (avec des spectacles comme Cincali !Mineur à vie ou Le mouton et la Baleine) ? Comment sélectionnez-vous les spectacles dans cette thématique ?
On cherche à avoir une programmation équilibrée : des spectacles plus accessibles pour les ados, plus légers parfois, des spectacles avec une portée politique pour certains. Une programmation qui résonne aussi avec les préoccupations des associations de Charleroi. Ce sont des spectacles plus pointus à d’autres moments et des choses plus populaires, grand public. On cherche à susciter une prise de conscience critique des réalités de la société (avec l’éducation permanente), c’est un de nos objectifs fondamentaux. Bertold Brecht disait : « Si le théâtre ne renouvelle pas notre regard sur le monde, qu’il disparaisse » ! Je pense qu’on n’a pas encore fait mieux que l’artistique pour éveiller l’esprit critique et pour éclairer sur certaines questions de société. On défend une vision plurielle, avec du divertissement, mais un centre culturel est également l’endroit pour traiter des questions de société.

Hervé Guerisi dans Cincali! Mineur à vie
Hervé Guerisi dans Cincali! Mineur à vie

Je ne suis cependant pas un spécialiste des questions interculturelles. À « interculturel » je préfère les termes : métissage, société hybride, cosmopolite. Dans le métissage, on perd un peu de sa culture, mais surtout pour construire quelque chose de nouveau… Je m’intéresse plus aux cultures avec un petit « c » et avec un « s » dans lequel la dimension métissée, multi ou inter culturel, hybride (ou appelons comme on veut) s’intègre dans une réflexion plus globale contre toutes les discriminations : le genre, le handicap, l’orientation sexuelle, l’origine….

 

Comment envisagez- vous la collaboration avec le réseau associatif local ? Quel est son apport ?
Un apport réciproque, pas comme des pourvoyeurs de spectateurs. Une réelle collaboration dans une logique de co-construction. Historiquement, Pierre Noël «Le Monsieur théâtre de l’Eden» a toujours bien fait ça. Pierre parvient, dans la programmation, à saisir les questions qui interpellent, qui intéressent les différentes associations de Charleroi. à côté de la programmation, il y a aussi des projets à inventer, à co-construire. On est plusieurs opérateurs à réfléchir à un événement lié aux cultures urbaines, sans doute dans le cadre de « Mons 2015 »… Mais ce n’est pas le centre culturel tout seul qui dira ce qu’il faut faire, ça se décide ensemble. « Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ….» (Proverbe africain).
Eden
Boulevard Jacques Bertrand, 1-3
Tel : 071 20 29 93
www.pba-eden.be

 

  • Plus d’infos sur les spectacles du Parcours Pluriel? cliquez sur le lien suivant:

– Cincali

– Le mouton et la Baleine

– L’insoumise ou Scarlett O’hara au pied du terril

 

 

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